L’appel de la baston
Si aujourd’hui le Béhourd est un sport en pleine expansion, avec ses 34 équipes réparties dans la France entière et son nombre de participants qui ne cesse de croître, il n’en a pas toujours été ainsi. En réalité, le Béhourd a connu des débuts modestes, et pas plus tard qu’au début des années 2010, avec le développement de l’association internationale de combat médiéval (HMBIA), et ses règles universelles, plus sécuritaires que ce qui se faisait parfois à l’Est… Avouons-le, des légendes urbaines se sont faites autour des Slaves. On dit qu’ils adorent démonter les articulations avec des fauchons tout juste réglementaires, qu’en Russie, la baston est un sport traditionnel, mais le plus terrifiant… C’est qu’une seule de leurs claques a la puissance de 100 mandales de daron ! Les combats en octogone « M1-Medieval » sont très populaires dans les pays de l’Est.
Nouvelle discipline, nouveaux dilemmes
Lorsqu’on vient du milieu de la reconstitution, on a déjà les pieds dans le bain du médiéval, on a des connaissances historiques, de l’équipement, des contacts… Mais parfois pas le bons pour du béhourd ! Le problème qui s’est posé pour les premiers combattants était non pas de trouver une armure fidèle à 100% aux armures de bataille du XIVème ou XVème siècle, mais plutôt de trouver une armure reflétant l’équipement porté à l’époque, tout en restant bonne pour le tournoi : acier plus épais, formes plus facilement réparables, et au prix plus abordable bien sûr…
Pourquoi est-ce qu’une réplique exacte d’armure de bataille n’irait pas ?
Comme le dit le dicton : une armure de bataille protège de la mort, une armure de tournoi protège des blessures. Il y a plusieurs raisons à cela.
Tout d’abord, faire la guerre, ça n’est pas tournoyer ! Partir en campagne, c’est crapahuter à travers les plaines, les montagnes et les forêts, c’est faire le camp, lever le camp, laver le camp, salir le camp… Surtout, c’est voir l’armée ennemie au loin, s’imaginer une bataille épique, puis se rappeler que les batailles étaient rares comparées aux sièges…
Pour finir dans un campement, cette fois ci à quelques centaines de mètres d’un rempart qui prendra des mois à tomber. De ce point de vue-là, le tournoi est (légèrement) plus court, avec des combats de quelques minutes seulement, mais d’une grande intensité.
Donc l’armure de bataille doit avant tout être confortable sur le long terme, quitte à privilégier un poids faible et une grande mobilité, mais à sacrifier de la protection. En tournoi au contraire, il faut que la protection soit optimale, même si l’armure pèse plus.
S’il est fréquent de voir des casques de 3mm d’épaisseur en Béhourd, il le sera tout autant de voir des casques de 1.5mm d’épaisseur dans les musées. Pour vous donner un ordre d’idée, les armures de bataille du XVème siècle pesaient aux alentours de 15 à 20 kilos, quand les armures de béhourd peuvent parfois peser le double !
Moitié du XIVème siècle : spallières encore peu fréquentes, la visière du casque n’est pas maintenue fermée par un système, la maille reste prédominante.
Photo issue du projet March‘alpes, la traversée des alpes en armes.
Heaume boulonné sur le plastron d’une armure de joute Italienne, fin XVIème siècle.
Et nous avons échappé au plus lourd : les armures de joute, faites pour protéger des charges à la lance, avec des épaisseurs de parfois 7mm… Pour un total avoisinant parfois les 80 kilos ! (Oui, oui, on comprend mieux d’où viennent les mythes ridicules sur le poids de l’armure). Ainsi démarra la quête pour l’armure « histo » de béhourd, qui, contrairement à celle du saint Graal, a fini par payer.
Armure histo… Combat histo ?
Lorsque nous parlons de tournoi, de « pas d’arme », de duel, nous ne nous imaginons pas de combats brutaux, de coups dans le dos, de lutte aux poings dans la mêlée. On pense bien sûr à un combat propre et honorable. Et pourtant… Les tournois au XIIème siècle étaient le théâtre de règlements de compte réglementés : duels à deux ou en groupe, l’objectif était autant d’impressionner les dames que de botter le séant d’un adversaire prétentieux.
De là, on laisse libre cours à son imagination : on s’agrippe, on se jette au sol, on se bourrine à coups d’épée, on fait des coups fourbes… Tout y passe, et les normes de sécurité du XIIème siècle étant plus libres que celles de la HMBIA, on ne s’étonne pas de voir l’Eglise condamner ces tournois « barbares ». C’est sans compter la résurrection du tournoi au XVème siècle par René D’Anjou, aussi passionné par la bravoure de ses prédécesseurs que le sont nos combattants de Béhourd aujourd’hui. Il a instauré de nouvelles règles plus encadrantes, avec des armes et des armures appropriées (donc armes émoussées, zones où la frappe est interdite, estocs interdits, armures modifiées pour pouvoir mieux respirer et mieux voir…) Ce qui rappelle ce qu’on peut voir dans les tournois de Béhourd modernes. Une fois (approximativement) équipé, il était temps de se mettre sur la figure à grands coups de hache.
Une première fois à Azincourt en 2011 avec une poignée de combattants français et étrangers, puis en 2012 à la forteresse du Faucon noir, premier tournoi international d’envergure en France.
Durant ces débuts, les combattants s’équipaient petit à petit, parfois avec des combinaisons de pièces d’armure douteuses.
Cependant au fur et à mesure du temps et avec les pressions du nouveau comité d’historicité, l’équipement actuel des combattants est bien plus cohérent qu’avant.
C’est après ces premiers tournois que commence l’explosion du Béhourd : En 2013, le premier championnat du monde « Battle of the Nations » est organisé à Aigues-Mortes ! C’est en cette année d’ailleurs que sont créées les équipes Martel et Aquila Sequania.
Armures de tournoi, visières spécialisées et armes en bois.