Il y a 10 ans, se tenait la Bataille des Nations (Battle of the Nations) 2013 à Aigues-Mortes, en France. Ce fut la première fois qu’une équipe de France participait à cette Coupe du monde du béhourd, organisée par la HMBIA. Pour fêter les 10 ans de cet événement mémorable, le comité de communication de la FFBéhourd vous propose une série de publications pour revenir sur une époque où notre sport n’en était encore qu’à ses débuts dans l’Hexagone.
Salut Edouard ! Peux-tu te présenter brièvement, ainsi que ton équipe ?
Je suis président de la Fédération française de béhourd et président du club Béhourd Ile-de-France (équipe Martel). Martel est une équipe que nous avions créée avec des amis fin 2012 et qui a depuis amassé gloire et honneur sur de nombreux tableaux. J’en ai été le capitaine jusqu’en 2019. Aujourd’hui je combats surtout pour le plaisir en 12vs12 et 30vs30.
Tu as combattu dans d’autres équipes ?
J’ai une fois combattu en mercenaire avec Aquila Sequania en 2016 au tournoi de Saint-Germain l’Herm.
Comment as-tu découvert le Béhourd et comment se sont passés tes premiers pas dans cette discipline ?
J’ai découvert le béhourd en 2006 lors d’un festival de reconstitution en Pologne (Wolin) : des Ukrainiens sur place m’ont parlé de cette discipline en m’invitant à me rendre dans leur pays pour m’y essayer. Ils m’ont par la suite envoyé des clés USB contenant des clips vidéos des combats les plus impressionants des festivals russes, biélorusses et ukrainiens de l’époque, qui m’ont fait découvrir les mythiques clubs Bern, Ordo Templi Boreis, PLK… L’année suivante, je me rendais au festival de Rusborg (Russie) en leur compagnie pour ma première vraie mêlée de béhourd.
Tout ceci précède la création de la HMBIA et de Battle of the Nations, il n’y avait donc pas de règle vraiment définie autre que « si tu es au sol, tu es éliminé ». Les coups pleuvaient donc dans tous les sens avec toutes sortes d’armes, sans aucune vérification et j’étais en armure viking (cotte de maille, cervellière à nasal, gambison). J’ai reçu de nombreuses blessures. On disait : « la reconsitution, c’est la douleur. » Se jeter tête baissée dans le fracas au mépris du danger et de la peur avait un certain panache ; cela faisait partie intégrante de l’esprit du béhourd. C’est aussi ce qui faisait, à mon sens, sa beauté.
Tu fais partie des rares combattants de Battle of the Nation en 2013 à être toujours en activité Peux-tu me parler un peu de cette expérience ?
Mon premier objectif avait d’abord été d’importer le béhourd en France. C’était chose faite, mon objectif suivant était de mener une équipe de France à la Bataille des Nations, championnat du monde légendaire de la discipline. J’ai parallèlement aidé les organisateurs à mettre en place l’événement en France et organisé le tournoi de qualification pour l’équipe de France, dans la mesure où je devais en être le capitaine. Nous avons ainsi eu une équipe de france complète, prête à participer dans toutes les catégories, pour un Battle of the Nations sur le sol français. On ne pouvait rêver mieux !
L’expérience du festival en lui-même fut une aventure extraordinaire, qu’il me prendrait des heures à raconter en détails. Elle fut pleine de stress, de joie, de découvertes, de rencontres, de déceptions aussi…
Pour ma part j’endossais le rôle de capitaine pour la première fois et n’ai combattu qu’en 5vs5, dans l’équipe France 1. Nous menâmes nos combats avec férocité jusqu’à ce que Pologne 2 ne nous arrête en huitièmes de finales. Nous nous sommes classés 10ème au classement général des équipes.
Aujourd’hui mon plus grand regret est de ne pas avoir combattu en 21vs21 le premier soir (nous avions décidé que France 1 devait se préserver de tout risque de blessure).
Y a-t-il une anecdote que tu souhaiterais nous partager ? Un grand moment que tu as vécu lors de Battle of the Nation 2013 ?
La cérémonie d’ouverture a été un grand moment. Pour la première fois nous nous présentions vêtus de tabards à fleurs de lys, brandissant l’Oriflamme, le Tricolore et des drapeaux régionaux. C’était une vraie fierté. Nous avons chanté la Marseillaise à pleins poumons, une main sur le cœur. Le public était tout bonnement galvanisé et nous a encouragé avec ferveur quatre jours durant.
En dix ans, notre discipline a évolué. Toi qui en as été l’un des témoins privilégiés de par ta fonction de président de la Fédération Française de Béhourd, quel est ton regard sur l’évolution de notre sport ?
J’en ai été le témoin mais surtout l’acteur, en réalité. En 10 ans je constate que la notoriété de notre sport s’est grandement accrue. La médiatisation a fait son chemin et beaucoup de gens connaissent le mot « béhourd » et savent à quoi il se rapporte. Je suis heureux de voir que le béhourd a changé la vie de tellement de personnes, en France et dans le monde. D’une époque où nous organisions des combats dans des parcs publics sans aucun moyen, nous avons maintenant accès à de vrais moyens et à des lieux historiques prestigieux. Les oiseaux de mauvaise augure qui il ya dix ans scandaient « il va y avoir un mort » se sont tus et sont forcés de constater que le béhourd s’est imposé comme la discipline de combat médiéval par excellence.
Aujourd’hui le sport est beaucoup plus structuré, les équipements de meilleure qualité (tant historique que sécuritaire) et les combattants sont plus techniques, mieux entraînés, plus uniformisés et plus axés sur le 5vs5. La lutte a pris le dessus sur les échanges de coups et je constate que la nouvelle lice à bords larges de la Buhurt League n’y change rien, malheureusement.
Le duel est en train de monter en puissance, cette année l’illustrant bien avec pas mal de tournois programmés. Comment vois-tu cette émergence ?
C’est une bonne chose que le comité de duel et la SAEA arrivent à mettre en place un vrai circuit national de tournois en 1vs1. Certains pratiquants ne souhaitent pas combattre en équipe tandis que d’autres voient dans le duel une porte d’entrée dans la discipline, dans la mesure où il requiert un investissement moindre pour débuter (tournois de béhourd léger, pas besoin d’avoir une équipe, moins de risques de blessure…).
A tes débuts dans la discipline, quels étaient tes objectifs ? T’imaginais-tu présider une fédération et sur une aussi longue période ?
Au début je voulais juste me battre. Ma soif de combat étant inassouvie, j’ai été contraint de prendre les devants et de faire en sorte que le béhourd existe en France. Au départ je n’imaginais rien, je me suis contenté d’agir. « Au commencement était le verbe ? Non, au commencement était l’action. » – Faust (Goethe)
Aujourd’hui quels sont tes objectifs ?
Si la fédération veut avancer, tout ne doit plus reposer sur moi. J’essaye de déléguer un maximum de choses et de répartir les tâches ainsi que les responsabilités pour que le mouvement continue à se développer efficacement. Le structure doit pouvoir perdurer sans moi.
En tant que combattant je n’ai pas vraiment d’objectif, juste combattre de temps en temps en 12vs12 ou 30vs30 pour le plaisir.
A la fin du mois d’avril ont eu lieu les championnats du monde IMCF à Belmonte en Espagne et ceux de la Buhurt League à Libusin. On te voit sur l’un de ces évènements ?
Non je n’étais ni à l’un ni à l’autre !
Tu souhaites ajouter quelque chose ?
Tellement de choses se sont passées en dix ans… je regarde en arrière avec nostalgie, en repensant à toutes ces aventures. On peut vraiment dire que j’ai consacré ces années au béhourd et ce fut sans regret. Je remercie tous ceux et qui ont contribué et ont soutenu ce qui était qualifié de folie par tant il y a dix ans.
Merci à toi pour cette interview, porte toi bien !
Propos recueillis par Orphée Hagenstein